Extraits
de Mine de Rien
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ACTE I
Rien. Un tabouret. Quelque part, un vieux journal. Par terre, une écuelle.
1.
Delphine entre, suivie de Christophe, un sac de voyage à la main qu’il posera où il veut.
Delphine : Ah ! Non ! Non, ce n’est pas possible ! Comment as-tu pu me faire venir ici ?!
Christophe : Quoi ? On n’est pas bien ?
Delphine : Non ! En Martinique, on est bien. Sur les plages de la Costa del Sol, on est bien. Mais à Frampignolle les Barrichon, non ! Non, on n’est pas bien ! Dis-moi. Avoue. Qu’est-ce que tu as fait pour te retrouver ici ?
Christophe : Mais rien, je te l’ai dit…
Delphine : Une entreprise internationale qui vient s’installer à… Non, je ne peux même plus le dire. Tu as volé dans la caisse, c’est ça ? Tu leur as fait perdre des millions ? Ils t’ont puni !
Christophe : Arrête de t’énerver… Profite…
Delphine : Profite ? Mais profite de quoi ? Des cailloux qui traînent sur le chemin ? Haaaaan ! Le beau caillou ! En deux secondes, on en a fait le tour ! Je ne vais pas m’exclamer devant tous les cailloux que je rencontre, tout de même !
Christophe : Regarde le paysage… C’est beau, non ?
Delphine : Je n’aurai jamais aussi bien vu l’horizon ! Partout, de l’horizon ! C’est bien simple : il y a tellement rien par ici qu’il n’y a que de l’horizon ! On est au centre et tout le reste, c’est de l’horizon !
Christophe : Calme-toi… La campagne, c’est la tranquillité…
Delphine : Ça ! On est arrivé depuis deux minutes et j’ai déjà l’impression que le temps s’est arrêté. Même lui, il ne supporte pas d’avancer à Frampignolle les Barrichon !
Christophe : Détends-toi…
Delphine : Ah ! Oui ? Et comment ?
Christophe va feuilleter le journal, Delphine le regardera atterrée.
Christophe : Lis le journal local… Voyons voir… Fête de la vache ! C’est très bien, la fête de la vache… Et là ! Une sortie pédestre ! Ah ! Ils ont fait un bingo, la semaine dernière…
Delphine : Lis-moi vite ça : je tremble de curiosité !
Christophe : Ne le prends pas comme ça, c’est parfait ! C’en est même hilarant !
Delphine : Hilarant…
Christophe : Tiens ! Rubrique nécrologique.
Delphine : Rubrique nécrologique ! On va rigoler, avec ça !
Christophe : « Nous avons le plaisir de vous faire part du décès de madame Cochard… »
Delphine : Eh ! Ben, il ne devait pas l’apprécier, celle-là…
Christophe : « Ni fleurs, ni plaques, ni couronnes, ni photos. »
Delphine : Au moins, elle ne coûtera pas grand-chose…
Christophe : « Pas de cérémonie ». Pas de cérémonie ? Qu’est-ce qu’ils peuvent bien en faire ? Ils ne vont pas l’empailler, tout de même…
Delphine : Ils vont la bouffer !
Christophe : N’exagère pas…
Delphine : Mais je n’exagère pas ! Je n’ai pas l’impression de m’être déplacée dans le pays, j’ai l’impression d’avoir voyagé dans le temps ! On est au Moyen-âge, ici ! Ils vont la désosser et la mettre dans du sel pour l’hiver, oui !
Christophe : Allez, ne t’inquiète pas, je te promets que ça va vite passer…
2.
Alphonse entre.
Alphonse : B’jour.
Delphine : Aaaaah ! Christophe ! Un autochtone ! Fais quelque chose !
Alphonse : Eum’ suis dit, « Tiens, eun’ voiture ! ». Arrêtions-nous, pour voir euss que qu’ssion… (« ce que c’est ») .
Delphine : Il a un air bovin ! Fais quelque chose, il est peut-être dangereux !
Christophe : Mais non ! Bonjour, mon ami. Entrez. Je vous aurais bien proposé quelque chose à brouter… A manger ! Pour vous accueillir, mais vous voyez : on vient tout juste d’arriver.
Alphonse : Ah ! Ben oui… Vous serions point les nouveaux, par hasard ?
Christophe : Si, si. C’est nous.
Alphonse : Ah ! Ben c’est c’que j’m’étions dit. Puisqu’y avions point d’voiture avant et qu’maint’nant, y’en avions une, eum’ suis dit : « Tiens ! Des nouveaux ! ».
Delphine : Et un esprit de déduction, avec ça…
Alphonse : Eh ! Ben, j’étions ben content, tiens ! Avec la mère Cochard qu’étions décidée, là… C’est qu’on n’étions plus que sept dans l’village…
Christophe : Décédée. Elle est décédée, pas décidée…
Alphonse : C’est ça ! Eul’ s’étions décidée à décéder !
Delphine : Vous n’êtes que sept dans le village ?!
Alphonse : Ben non…
Delphine : J’ai eu peur.
Alphonse : Avec vous, ça fait neuf ! C’est que ch’savions compter !
Delphine : Félicitations ! Depuis longtemps ?
Christophe : Arrête !
Delphine : C’est plus fort que moi.
Christophe : Nous sommes très heureux de vous rencontrer ! Je vous proposerais bien de vous asseoir mais…
Alphonse : Ah ! Ben c’étions point d’refus !
Alphonse s’assoit sur le tabouret. Christophe et Delphine ne savent pas où s’asseoir. Après un court temps :
Delphine : Il ne se gêne pas, lui ! Christophe ! Fais quelque chose !
Christophe : Oui… Je vous proposerais bien quelque chose à boire mais on vient d’arriver. Je n’ai que l’eau du robinet…
Alphonse : Ah ! Ben d’accord.
Delphine : On n’a pas de verre. Merci d’être passé.
Alphonse : Ah ! Ben la gamelle, là, ce serions très bien.
Christophe et Delphine regarde l’écuelle. Echange de regards. Finalement, Delphine va chercher de l’eau avec.
Alphonse : Z’étions bien, ici, hein…
Christophe : Oui, oui… On vient d’arriver, mais on est très content. Surtout ma femme.
Delphine entre et lance un regard noir à Christophe. Elle donne l’écuelle à Alphonse qui boit bruyamment sous les yeux exorbités du couple. Il finira par s’essuyer la bouche avec sa manche avec un bruit de contentement.
Christophe : Je… Je vous ressers ?
Delphine : Je vous ressers ! Tu veux lui proposer un abreuvoir ?
Alphonse : Non, non. J’voudrions point abuser. Pis c’est qu’j’avions du travail, faudrions point qu’j’m’attarde…
Delphine : C’est ça.
Alphonse : C’est ça.
Alphonse ne bouge pas. Regards fixes entre Alphonse qui est content et Delphine qui voudrait le voir partir sans comprendre pourquoi il ne bouge pas.
Delphine : Alors merci d’être passé…
Alphonse : Ben j’vous en prie.
Alphonse ne bouge pas. Regards entre Delphine qui exhorte Christophe à faire quelque chose et Christophe qui ne sait pas quoi faire.
Alphonse : L’étions bien, eul’ tabouret, là…
Christophe : Oui, oui ! C’est parce qu’il est sur-équipé ! Avec trois pieds et un socle. Pour s’asseoir.
Alphonse : Ah ! Ben, oui, ben c’est pour ça…
Dans le dos d’Alphonse, Christophe et Delphine échangent de nouveaux regard et geste, dépassés par la situation.
3.
Marceline entre.
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